Publication : 05 Décembre 2025 Mise à jour : 09 Décembre 2025 Temps de lecture : 10 min

Pour faire suite à notre webinaire, introduction passionnante sur la Communication Non Violente (CNV), place aux travaux pratiques avec un atelier regroupant une dizaine de personnes, organisé au Campus Alençon au mois de novembre. Chargé de projet, de RH, consultant, managers, etc. : pour les participants, rien de tel que des mises en situation pour enclencher une prise de conscience sur la place cruciale que tient une bonne communication dans les relations en entreprises.  On respire, on se calme, on s’échappe de sa bulle communicationnelle... C’est parti !

La CNV pour soulager les conflits en entreprise et leur coût financier et humain

« La CNV, c’est un apprentissage, une éducation, ça se passe par répétition. C’est pourquoi, plus il y aura de gens sensibilisés à cette technique, plus on aura de chance qu’il se produise une bascule. Si 30% de la population étaient formés, la transmission se ferait naturellement » explique Sophie Laleman, formatrice. A l’occasion d’un atelier organisé par Sylvain Deneux, Responsable du service Formation Entreprises de l’UDD, au Campus Alençon, elle a précisé son ambition : « Je suis là pour accompagner le changement ».

L’enjeu n’est pas anecdotique : les coûts, financiers et humains, sont à la fois directs (absences, arrêts maladie, turnover, sollicitation d’intervenants externes), indirects (perte de productivité, présentéisme, erreurs, performance collective réduite) et cachés (dégradation du climat social, de l’image de l’employeur, de la réputation ; désengagement, fuite des talents, innovation bloquée, stress, burn-out, anxiété). Pour enrayer cette dérive, la CNV propose de revoir notre manière de communiquer : « Parler de ses ressentis, ce n’est pas de la faiblesse », précise la formatrice, et c’est tout l’objet de l’atelier ».

Installée en demi-cercle, par petits groupes, la dizaine de participants écoute les précisions de Sophie Laleman : « Il s’agit d’un atelier, pas d’une formation. Nous sommes réunis pour comprendre ce qui déclenche une tension, pour vivre la différence entre une réponse réflexe et une réponse réfléchie ».

Libérer la parole pour laisser la CNV se diffuser

Les travaux pratiques peuvent commencer. Chaque groupe se réunit pour raconter une expérience de tension professionnelle. Individuellement, les participants doivent répondre à plusieurs questions : Quelles ont été vos émotions sur le coup et après le conflit ? Quels auraient été vos besoins et qu’est-ce que vous auriez aimé entendre ? « L’objectif est de mettre en action votre corps, il sera sollicité pendant les 3 heures ! » précise la formatrice. 

La première session dure 15 minutes et les réactions ne se font pas attendre : « C’est trop court ! », « C’est agréable, ça un côté thérapeutique », « Cela permet de rencontrer les autres participants ». Sophie Laleman questionne l’auditoire : « Avez-vous évoqué vos émotions ? colère, rage... Avez-vous mis un mot sur vos contrariétés ? Avez-vous pu formuler des besoins pas nourris ? Respect, écoute, loyauté ». Ce n’est pas tout à fait le cas.

Alors, pour pousser plus loin l’expérience, deux autres sessions d’échanges s’enchainent, plus courtes (10 minutes puis 6 minutes), toujours sur le même modèle, afin de cultiver « l’écoute active, ressentir ce que l’autre ressent, stimuler l’empathie ».

Le cri du corps !

En 3 séances d’échange, à force d’entrainement, la parole se libère, les émotions se révèlent. L’expression de la sensation physique se fait plus précise, plus franche. A l’instar de Corinne, qui gérait une grosse équipe de cadres et qui conduit aujourd’hui un plus petit groupe : « J’ai une personne qui trouble l’équilibre de l’équipe. Quand j’y pense, j’ai la sensation d’une envie de vomir ». Quant à Aurore, anciennement chargée de communication dans une grande association, elle s’est retrouvée confrontée à une situation déstabilisante : « On remettait tout le temps en question ce que je faisais. Mes collaborateurs travaillaient avec une méthode dépassée, je n’étais pas alignée sur le process. Ça ne fonctionnait pas, je ressentais de la frustration. J’avais la boule au ventre et elle revient quand j’en parle ». 

Sophie Laleman encourage cette franchise : « Allez dans votre corps, pour voir comment ça se passe. Et là, nommez bien la ou les émotions, ainsi que les besoins non nourris.  Quand la tension va se déclencher dans notre corps, il va lâcher du cortisol, un cocktail explosif. Quand vous vous laissez basculer dans la colère, physiquement il se passe quelque chose, cela va rester 3 semaines dans l’organisme et se traduire par des douleurs d’articulations, des troubles musculo squelettiques ou cardiovasculaires, un sommeil perturbé, etc. ».  

« Une phrase, une seconde, un signal interne : un mot peut tout déclencher. Dans 90% des cas, la tension commence dans le corps, avant même le dialogue » ajoute-t-elle. 

L’invisible relationnel et la bulle communicationnelle

Sophie Laleman propose ensuite de mettre des mots sur les maux pour comprendre le mécanisme des conflits : « Quand l’humain veut désespérément quelque chose, il agresse l’autre et lui met la pression. Et donc, l’autre se barricade dans sa bulle communicationnelle, monte des remparts, lève le pont levis. Celui qui est en demande amenuise ses chances de négociations et d’obtenir ce qu’il veut le plus. Les tensions ne viennent pas des personnalités, du manque de compétence, du manque de motivation. Elles viennent de l’invisible relationnel et c’est ça qui dirige réellement les interactions internes ». 

Ces mécanismes provoquent des réactions nocives, incompatibles avec une relation apaisée : « Si vous râlez, que vous avez un discours négatif : c’est vous-même que vous intoxiquez » poursuit la formatrice, « Arrêtez d’être réactif, de nager dans le cortisol toute la journée, de tordre les histoires, ou de faire des généralités. Ces biais cognitifs laissent chacun seul sur sa planète. Pour rejoindre les autres, il faut enquêter, comme un anthropologue, s’intéresser à l’autre ». 

Pour cela, il convient de parler doucement, d’écouter, en faisant passer de l’émotion : « Pour bien communiquer, il doit y avoir un émetteur et un récepteur. Si on n’ouvre pas sa bulle communicationnelle, c’est impossible ». 

Manager de manière constructive avec la CNV

Ecouter, prendre le temps, rester posé, observer sans interpréter, exprimer une demande claire, ne pas jouer aux devinettes : ces postures sont peu répandues dans le paysage managérial français, selon la formatrice qui estime que « Les managers ne sont pas assez formés à gérer des équipes ». Et cela impacte fortement la relation de travail, la créativité et l’efficacité.

« Quand vous vous trompez vraiment de style de management, de manière radicale, vous pouvez envoyer quelqu’un à l’hôpital. A cause d’un management directif par exemple, quand il est inapproprié ». Pour trouver l’équilibre, il existe une clé : savoir qui l’on a en face de soi. Cela nécessite de se donner du temps pour observer, de ne pas croire son langage intérieur. Ce langage intérieur n’est pas vous, c’est une partie de vous-même : « Les parties négatives ont l’intention de vous protéger mais font faire des bêtises. Il faut commencer par mettre les choses à plat pour laisser le temps aux infos de remonter. Et vous allez convoquer une autre partie de vous-même qui va voir les choses positivement, y compris qu’une erreur, un conflit, est une occasion de progresser ». 

Brailler, gesticuler, matraquer, faire peur, réactiver les traumatismes, « donner des coups de poings psychologiques », c’est aller à l’encontre de ce que nous voulons obtenir, empêchant la motivation et l’énergie d’aller dans le bon sens. « Ce qui a un impact positif, c’est l’aventure humaine, l’enthousiasme, des règles et valeurs coconstruites ensemble. Qu’il y ait du sens, un objectif clair, et que chacun puisse proposer ses idées ! ».

Laisser parler ses émotions, prendre le temps de l’écoute

L’heure est venue pour les participants d’exprimer leur ressenti à l’issue de cet atelier.  « J’ai aimé qu’on puisse prendre le temps de la pratique, surtout quand on parle des émotions. J’aurais eu besoin de plus concret sur le management, d’exemples » exprime Amori. Sophie Laleman précise que « 3 heures, cela reste court. Mais cela permet d’avoir des outils, une base de culture et de l’appétence pour qu’après, ça devienne du ressenti, du vécu. Le but était de vous donner une grille de lecture large et solide ». Aurore, pour sa part, a « apprécié que l’atelier laisse la part belle aux émotions, qui manquent très souvent dans les managements pour en avoir subis et observés beaucoup. Je trouve qu’en France, le management est très directif ». 

Anne-Lucie est partagée : « Nous avons tous des postes très différents, c’était intéressant de s’enrichir des expériences des autres et de faire des parallèles. Ça donne des idées. Mais je ne suis pas forcément d’accord avec l’idée que tout ce qui nous arrive est un cadeau, cela m’irrite toujours un peu, tout le monde n’est pas capable d’accueillir les épreuves de cette manière ». Réponse de la formatrice : « Vous avez raison. Mais c’était une proposition, pas une injonction ». 

Marine se réjouit de sa matinée : « Un atelier comme celui-ci permet de se remettre en question. J’ai compris l’intérêt de synthétiser ». Pour Corinne, c’était l’occasion de prendre une bouffée d’oxygène : « Dans mon entreprise, je n’appartiens pas à un groupe, j’ai donc besoin, à l’extérieur, de me nourrir d’autres expériences humaines, c’est comme une boite à outils. L’écoute, la possibilité de rebondir : cela a beaucoup d’intérêt pour moi ». 

Enfin, Isabel exprime « beaucoup de joie. Je repars avec l’envie que ça devienne une culture dans mon entreprise. Je vais interpeler ma direction. Cela fait du bien d’entendre que les émotions ont leur place dans le monde professionnel alors qu’on n’en parle quasiment jamais ». Réponse du tac au tac de Sophie Laleman : « Vous avez raison, le plus souvent, on ne parle que de la motivation » ! 


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