« L’impact du management sur la santé est considérable » : c’est l’un des constats posés par Sophie Laleman, formatrice et coach, lors du webinaire organisé par le Centre de formation Entreprises de l’Université du Domicile, consacré à la Communication Non Violente (CNV), et animé par Sylvain Deneux, Responsable du CFE. Voici les principaux enseignements à retenir.
Les tensions et conflits au travail coûtent 152 milliards d’euros par an
La Communication Non Violente (CNV) est une méthode développée par Marshall Rosenberg, psychologue américain (1934-2015). Elle permet de prévenir les tensions, d’instaurer des relations de qualité et de renforcer la coopération.
En France, on estime le coût annuel des tensions et conflits à 152 milliards d’euros (étude menée par OpinionWay). Deux tiers des salariés sont confrontés aux conflits professionnels. « C’est considérable », comme l’a souligné en introduction du webinaire, Sophie Laleman, coach et formatrice, qui a précisé la typologie des coûts des conflits au travail :
- Coûts directs : absences, arrêts maladie, turnover, sollicitation d’intervenants externes ;
- Coûts indirects : perte de productivité, présentéisme, erreurs, performance collective réduite ;
- Coûts cachés : dégradation du climat social, de l’image de l’employeur, de la réputation ; désengagement, fuite des talents, innovation bloquée, stress, burn-out, anxiété.
« Les impacts des conflits professionnels sont conséquents : ils sont financiers bien sûr, mais surtout, humains. Les salariés passent beaucoup de temps en entreprise et quand il y a des conflits, ils les ramènent chez eux. L’entreprise a les outils pour faire baisser les tensions et la CNV en est un ».
La CNV a un impact concret sur la créativité
« Quand on n’a plus confiance, on ne donne plus ses idées et cela impacte la créativité » : ce constat, Sophie Laleman le dresse dans nombre d’organisations. Elle va même plus loin : « L’esprit d’équipe ne peut pas exister s’il n’y a pas des valeurs fortes telles que la sérénité et la protection psychologique. C’est justement ce que la communication non violente nous apporte ! ».
La CNV s’apparente à un parcours d’initiation qui va amener les collaborateurs, les managers, les RH, à s’interroger. Il s’agit d’une méthode qui « respecte l’individu » et cela n’est pas possible « dans un climat de stress et de doute de soi ».
La CNV : un outil de pacification
Sophie Laleman note que la CNV est utilisée dans les conflits mondiaux : elle aide à désamorcer les tensions avant qu’elles ne s’enveniment, elle favorise la reconnexion humaine, elle est utilisée dans des processus de réconciliation et de justice restaurative. Elle est considérée comme un « outil de pacification ».
La déployer en entreprise permet :
- Une transformation durable des relations ;
- Le développement d’une culture de coopération ;
- La prévention des conflits et l’amélioration du bien-être collectif.
Elle est notamment pratiquée chez EDF depuis plus de 10 ans pour permettre une amélioration du climat social dans des équipes en tension. Plusieurs hôpitaux français la mettent également en œuvre pour réduire les tensions internes et favoriser une meilleure relation soignants/familles/patients. Dans les PME, elle constitue un outil de désamorçage de conflits sociaux et managériaux.
Quand les partenaires sociaux et les dirigeants sont formés à la CNV, cela permet de faire « du très bon travail et tout le monde en profite ».
Moins de jugements, plus d’écoute : les clés d’une CNV efficace
La formatrice a par ailleurs mis l’accent sur les freins à la CNV :
- Jugements rapides et interprétations ;
- Manque d’écoute réelle ;
- Peur du conflit ou agressivité défensive ;
- Recherche de coupable plutôt que de solutions.
Elle a ajouté : « Nous subissons des biais cognitifs qui empêchent d’être pragmatiques ». Les biais cognitifs sont des distorsions auxquelles nous faisons face : tendance à généraliser, à faire des raccourcis, etc. Pour y échapper, Sophie Laleman préconise le travail en intelligence collective : prendre une décision collégiale, s’interroger ensemble sur la situation.
Autre frein majeur à la CNV : les problèmes d’égo, cette tendance à considérer que c’est « toujours la faute des autres. Ce besoin de manipuler et manœuvrer plutôt que d’avancer ensemble, ce penchant pour le « oui mais » ». Elle considère que si, dans une réunion, on observe 7 interventions ou comportements de ce type, il y a alors urgence à établir une CNV, et précise que « l’intérêt, c’est de créer une culture, qu’il y ait une appropriation par tous les collaborateurs ».
La CNV est une posture avant d’être une technique
Le webinaire a également permis de faire un zoom sur les objectifs de la CNV :
- Elle vise la coopération plus que la victoire d’un point de vue ;
- Elle invite à la responsabilité personnelle et à la compréhension mutuelle ;
- Elle se différencie des approches centrées sur la persuasion et le contrôle ;
- Elle vise à préserver la qualité du lien même en cas de désaccord.
La CNV va permettre :
- D’accepter la différence ;
- De travailler sa tolérance ;
- De ne pas voir les choses de son seul point de vue.
« Pour que quelqu’un accepte d’ouvrir sa bulle communicationnelle, il faut qu’il soit en confiance. Ce n’est pas par une démarche violente ou traumatique qu’on va rassurer son collaborateur. Et, pour une bonne communication, il faut un émetteur ET un récepteur » explique la formatrice qui utilise une métaphore pour compléter son propos : « Un bon communicant est un bon serrurier qui trouve la bonne clé pour la bonne serrure. Et ce n’est pas en faisant sauter la serrure que ça pourra fonctionner ».
La CNV repose sur 4 piliers
La CNV repose sur 4 étapes clés :
- Observer (sans juger) : ce que je vois/j’entends ;
- Emotions et sentiments : ne pas les combattre mais les comprendre. Exprimer son ressenti sans accuser ;
- Besoin : Identifier son besoin ; accepter que ce qui fonctionne chez nous ne fonctionne pas forcément pour les autres et que, bien souvent, nous projetons sur l’autre nos désirs, nos besoins.
- Demande : après ces 3 étapes, nous allons pouvoir formuler une demande claire et/ou proposer une action concrète et négociable.
« La CNV n’est pas le monde des Bisounours. Elle permet d’être assertif, c’est-à-dire d’exprimer une vérité de fait. L’impact du management sur la santé est considérable. Il est donc nécessaire de dire avec bienveillance ce qu’on a à dire, en comprenant le point de vue de l’autre. Si on met de l’égo (fuite, agressivité), on endommage la possibilité d’aller plus vite et plus loin ensemble ».
La CNV : catalyseur de performance collective et de RSE
Tout ce qu’on va laisser s’installer comme situations floues, les malentendus et conflits latents : « ce sont des peaux de bananes » pour la relation de travail. Face à cela, la CNV peut apporter :
- La réduction des tensions et malentendus latents ;
- Plus de coopération et de confiance ;
- Une action en faveur de la Responsabilité individuelle et collective (RSE) ;
- Un leadership plus humain et cohérent : « profiter de l’intelligence et de la synergie des équipes, c’est ça la force du collectif ! ».
Sophie Aleman invite les participants au webinaire à comprendre que : « Là où j’ai du pouvoir, c’est sur moi-même » et pas sur les autres.
Du recrutement à la réunion : la CNV transforme l’organisation
La formatrice a partagé quelques pistes d’application de la CNV :
- Réunions et entretiens ;
- Feedbacks réguliers et cadrés ;
- Rituels de régulation ;
- Formations, ateliers, groupes de pratique CNV.
« La force du nous, c’est de se sentir plus en confiance, en sécurité » complète Sophie Laleman. Elle insiste sur le fait que la CNV doit s’appliquer dès le recrutement, qu’elle nécessite de s’appuyer sur le savoir être, notamment à travers une période d’intégration, la transmission de la culture de l’entreprise (quel exemple est donné ?), et parfois par le biais de formations proposées aux futurs collaborateurs avec un travail sur les soft skills. La formatrice insiste sur le fait que les savoirs être sont centraux. « Oui la CNV peut faire de grandes choses à condition qu’elle imprègne toute l’entreprise » conclut la formatrice.
Sylvain Deneux a conclu en rappelant l’accompagnement proposé par l’UDD en lien avec la communication non violente. Un accompagnement qui passe par des formations clés en mains (Gérer l’agressivité et les conflits, optimiser sa communication relationnelle et anticiper les conflits) ou sur mesure, à découvrir dans notre catalogue. Pour (ré)écouter les échanges et témoignages du webinaire, suivez ce lien :